Bonjour à toutes et à tous !
Avant de rentrer dans le vif du sujet, petit aparté :
J’ai eu quelques retours encourageants qui me poussent à me poser quelques questions quant au contenu de la newsletter. ✍️
Initialement prévu pour relater fidèlement mes semaines et mon plan d’entrainement, sans doute que j’essayerai d’élargir le propos en parlant plus généralement d’entrainement en course à pied et pas uniquement pour le 800m.
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Ceci étant dit, place à ma partie préférée : les tests. 🏃♀️🏃♀️
Pourquoi évaluer ?
De base, à la FAC, une des premières choses que l’on t’apprend c’est faire des tests. Connaître l’athlète sur le bout des doigts et définir le bon programme. 👌
Concrètement, quand tu essayes d’appliquer les conseils :
tu ne sais pas vraiment quoi faire du résultat
le test ne correspond pas toujours aux qualités attendues par la tâche
Avec les années passées à m’entrainer avec Tao (le seul, l’unique, l’incroyable coach qui m’a permis de faire 1.55 et 4.03) et à force d’échanger, je retiens la phrase suivante :
“Les tests c’est bien, mais qu’est que tu fais quand tu a progressé ? Qu’est que tu fais si tu n’es pas en forme un jour à l’entrainement” 😧
Alors, les tests, je me dis: ok. Mais à condition d’en faire régulièrement pour suivre l’évolution de l’athlète.
Mais la réalité du terrain est autre : qui fait des tests tout les mois quand on a un groupe de plusieurs athlètes ?
Et quels tests ? Un test VMA ?
Non. 🤬 Ne s’appuyer uniquement sur un test VMA est absurde quand on connait l’implication des autres filières énergétiques dans la performance. (et en même temps, chez le débutant, c’est sans doute mieux que rien)
Le schéma ci-dessous montre bien cela. Bien qu’un coureur de 800m et de marathon puissent avoir la même VMA, le coureur de 800m sera capable d’aller plus vite sur courte distance et le marathonien capable de maintenir des allures plus élevées sur des distances plus longues.
Du coup, si tu t’appuie juste sur la VMA, certains entrainements seront trop faciles et d’autres trop durs. Je suis sur que certains athlètes se reconnaissent ! 🤥
Evaluer le niveau de départ c’est faire un état des lieux de l’état de forme actuel certes, mais c’est surtout, de comparer avec les qualités nécessaire pour réussir la tâche.
Dans le cas du 800m, en étant très simpliste : il faut être (1) rapide (2) avoir une bonne VMA.
Cette newsletter est vraiment ultra pointue ! C’est dingue 👍
Donc : Qu’est ce qu’il faut évaluer ?
Naturellement j’aurai répondu : faisons un test sur 100m et un test de VMA.
Mais le problème : qu’est ce que j’aurai bien pu faire de ces valeurs ?
Comment savoir si mon résultat sur 100m était correcte ou trop éloigné d’une “bonne performance” sur 800 ?
Comment savoir si je dois travailler cet axe ou prioriser un autre ?
C’est exactement pour cela que j’ai adoré discuter avec Daniel quand je l’ai rencontré.
Il a publié quelques articles encore utilisés concernant la prédiction de performance1.
Dès que je l’ai rencontré, il a été capable de me dire, en s’appuyant sur ses tables de cotation, quel était le niveau que je devrai attendre sur 100m et 1500m pour faire moins de 2’00 au 800. 😆
Forcément, je me suis amusé à le questionner sur le niveau de Rudisha sur 100m, le niveau de Mekhissi sur 400, le niveau de Pierre Ambroise Bosse sur 1500m …
Ça m’amuse toujours . Et je pense que tous les passionnés en ferait autant. D’ailleurs ça dépasse le cadre du demi-fond. Il a recrée des tables pour toutes les disciplines (vous pouvez sans doute avoir quelques exemples de classement Francais (2019) ici)
Je crois que, maintenant que je le connais mieux, son truc c’est ça : prédire la performance (et analyser la tâche)
Être capable de trouver un perf en s’appuyant sur plusieurs autres chronos.
Il est très, très, très maths.
Je pense vraiment que son travail serait un super outil pour tous les entraineurs pour avoir des points de repères pour planifier les entrainements.
Il a développé son propre concept de “profil” pour être capable de déterminer quels chronos il faut faire sur chaque discipline pour atteindre l’objectif souhaité.
Nous y venons, voici les tests spécifiques qu’il utilise pour définir le profil de l’individu.
Et de le comparer aux besoins pour effectuer la tâche demandée, ici, le 800m.
4 tests pour construire un profil
Rapidement, j’explique le concept du profil.
1 seule performance (en générale la VMA) ne permet pas de prédire la performance correctement. (comme démontré un peu plus haut)
Bon, ça, c’est rien de révolutionnaire, un tas d’entraineur le disent largement.
A ce sujet : petit conseil lecture pour les anglophones et passionné d’entrainement running : The science of running (Steve Magness)
➡️ ➡️ Il “démonte” entre autre le concept “surfait” de la VO2max dans l’entrainement et conseille plutôt de planifier en faisant référence à des chronos sur des distances.
Les 4 qualités évaluées :
Pour en revenir au profil, selon Daniel, 4 qualités permettent de dresser le profil de l’athlète :
La puissance maximale
La capacité anaérobie lactique
La PMA ou VMA
L’endurance aérobie
Cette courbe “puissance/durée” est propre à chacun.
➡️ Plus je me rapproche d’un profil de coureur de 100m, plus la pente de la courbe est importante
➡️ Et plus je me rapproche 'd’un profil de marathonien, plus la pente de la courbe est “plane”
Ensuite, plus j’ai de points sur la courbe, plus cela va m’aider à prédire la performance
Vous me suivez toujours ?
Alors, en route pour les tests :
Les 4 tests correspondant :
Les 4 tests correspondant :
Voici les 4 tests utilisés par Daniel pour construire le profil :
La puissance maximale : un 30m ou 50m arrêté
La capacité anaérobie lactique (CAL) : 50 sec d’effort - 3 min de récup - 50 sec d’effort.
Objectif : faire la plus grande distance possible sur les 2x50 sec.
La VMA : test 3/3 (test conçu par Daniel)
3min effort / 3 min récup - vitesse fixe dans le pallier, augmentation progressive de la vitesse à chaque nouveau pallier
L’endurance aérobie : test de 30 minutes ou 10km ou performance équivalente (sur plus de 30 minutes)
Dans l’idée, je comprend totalement le concept.
Je pense d’ailleurs avec certitude que c’est exactement ce que font la majorité des bons entraineurs (d’ailleurs qui n’a jamais dit : avec un tel chrono sur 400m lors d’un 4x400, ce coureur de 5000 devrait s’essayer au 1500m).
Mes résultats aux tests :
Malheureusement je n’ai pas de belle courbe “Puissance-durée” à vous montrer.
Mais bon, je vous laisse l’imaginer avec les chronos suivants :
Test sur 50m arrêté : pour éviter la blessure, Daniel m’a proposé d’estimer à la louche un chrono sur 100m.
Résultat : 100m en 12”56 (estimé)
Test CAL : comme tout test de capacité lactique, il a vraiment été très difficile. Je suis resté au sol pendant 10 minutes. Et j’ai mis 30 min supplémentaires pour me sentir un peu mieux. Il y a bien longtemps que je n’avais pas ressenti telle souffrance. J’ai fait le test sur cendrée en baskets légères.
Résultat : 1er 50” : 356 m - 2ème 50” : 330m
Test VMA : c’est le premier test que j’ai fait. J’étais loin de penser que je serai autant en difficulté aussi tôt. J’ai fait le test sur cendrée en running.
Je pensai vraiment avoir au minimum 19 km/h de VMA.Résultat : 18,5 km/h
Test 10km : pour ce test, Daniel a une nouvelle fois fait preuve d’adaptation pour éviter que je fasse un effort maximal. Il a extrapolé un résultat que j’ai fait en footing rapide pour avoir une idée générale.
Résultat : 40 min 30 sur 10km (estimé)
Mon regard perso sur les résultats :
Après le test VMA je me suis vraiment dit que je partais de très loin finalement. J’étais assez déçu. Mais pas tellement surpris du fait de mon inactivité. C’est la première fois que j’en faisais un depuis cadet. Je ne me souviens même pas du résultat.
A l’inverse, le test de CAL, malgré qu’il ait été très difficile, je me suis vraiment rappelé que j’adorai ce type d’effort. Et faire 360m en 50” sans être à 100 %, en basket, ça m’a franchement motivé. En gros je me dit que je peux courir un 400 en 54” sur du tartan, avec des pointes.
Pour les estimations : j’ai aucune idée de ma valeur sur un 10km. Sur 100m j’ai fait 12”33 à 17ans.
Interprétation des résultats :
Pour Daniel, c’est super rapide, il n’a plus qu’à entrer les résultats dans son calculateur pour définir mon profil et être capable d’estimer les chronos que je serai capable de faire actuellement.
Avec mes chronos actuels, il confirme que je suis bien un coureur de 800m (750m sans doute). Avec l’entrainement, on peut faire évoluer légèrement un coureur mais on ne le fera jamais devenir aussi bon que dans sa discipline de prédilection.
Selon lui, actuellement, avec un profil coureur de 800 m, je serai potentiellement capable:
200 : 25”32
400 : 54”68
800 : 2‘07”10
1500 : 4’42”14
3000 : 10’29”02
5 km : 18’31”30
Evidemment cela ne veut pas dire que je vais les réaliser mais cela donne des indicateurs d’analyse
La première chose qui m’a marqué : j’ai peu régressé sur la “partie gauche” de ma courbe Puissance/Durée comparativement à la partie droite.
Sur 400, mon meilleur chrono était 52”80 vs 54”68 ici.
Sur 1500, mon meilleur chrono était 4’03 vs 4’42 ici.
C’est plutôt logique car on a tendance à tendre vers un profil plus puissant qu’endurant avec l’inactivité.
Autre question que l’on peut se poser : Tao me considérai à l’époque comme un coureur de 800m ET de 1500m. Je n’ai que très peu travaillé la puissance. J’ai toujours compté sur mes qualités. On pourrait dire que j’avais un profil 1000m.
Quels besoins pour un 800m en 1’59”99 ?
C’est là que ça devient vraiment intéressant.
Parce que le but des tests c’est avant tout de déterminer l’objectif à atteindre.
De déterminer des axes de travail.
Ma vitesse est-elle suffisante ?
Ma VMA est-elle vraiment limitante?
Difficile de le savoir !
C’est pour cette raison que Daniel a développé ses propres tables de cotation et de prédiction. Pour déterminer pour chaque performance, qu’est-ce que cela demande comme niveau de performance dans d’autres disciplines.
Pour le savoir, cela dépend forcément d’un paramètre important : quelle est mon profil de coureur.
Qu’elle est ma distance favorite hypothétique ?
Suis-je plutôt coureur de 800m ? de 1500 m ? de 3000m ?
Pour faire le même chrono sur 800m, le coureur de 3000m aura moins besoin d’être performant sur le 100m que le coureur de 400m : tout simplement car il a sans doute une VMA plus élevée.
D’après Daniel, pour un coureur de 800m, voici les chronos à atteindre :
200 : 12”25
400 : 52”84
800 : 1’59”99
1500 : 4’22”43
3000 : 9’40”55
Pour info, pour le record du monde de Rudisha ça donnerai (a peu près bien sûr) :
200 : 10.79
400 : 45.12
800 : 1:40.91
1500 : 3:37.94
3000 : 7:58.74
PS : si tu es curieux de savoir quels chronos il faut pour une perf, commentez cette édition et j’essayerai de soutirer les infos à Daniel ! 😈
Grâce à ces éléments, je sais maintenant le chemin qu’il me reste à parcourir. La courbe qui matérialise ça :
En rose : les performances à atteindre
En bleu : mes performances actuelles
En vert : l’écart entre les 2
A noter : l’échelle de points n’est pas celle donnée par la table hongroise mais par la table que Daniel a construit.
Autre note : il ne faut pas comparer cette courbe avec les exemples de courbes plus haut car ce n’est pas une échelle puissance / temps mais une échelle points/distance.
Quelques conseils :
Pas facile de faire ça tout seul quand on y connait pas grand chose.
Personnellement, je comprend tout à fait le principe mais je serai bien incapable de déterminer précisément si un athlète est plutôt endurant ou puissant.
Quelqu’un qui connait un peu l’athlé et à des références peu déjà s’en rendre compte avec un bon flair. 🐽
Par contre, je suis convaincu qu’il y a pleins de coureurs qui pensent être des endurants et pas du tout puissant et qui se trompent.
Ce qui est intéressant quand on visualise la courbe c’est que naturellement on s’aperçoit que la partie “gauche” peut franchement aider à améliorer la partie droite.
En d’autres termes, avoir une bonne vitesse maximale vous aide à améliorer votre VMA, qui vous aide à améliorer votre endurance.
Je constate que de nombreuses personnes, coureurs occasionnels, “s’entêtent” à faire des footings de plus en plus longs et difficiles et s’aperçoivent qu’ils stagnent.
C’est bien souvent que la qualité précédente est limitante. Souvent la VMA dans un premier temps. Et également les autres.
En un mot : favorisez la diversité dans vos entrainements. N’ayez pas peur d’inclure du sprint dans votre préparation. Cela ne viendra pas “détruire” votre endurance. Au contraire !
Bien évidemment, le conseil pourrait être le même pour des coureurs de distances plus courtes : votre endurance peut-être limitante.
Pour la prochaine édition, je vais parler de la planification et des différentes filières énergétiques à travailler ! 🤩🤩
On aura déjà bien posé les bases et je pourrai enfin vous raconter où j’en suis actuellement : j’entame ma 3ème semaine d’entrainement, les entrainements sont plutôt faciles :)
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Note importante :
Les informations que je donne ne sont en aucun cas des conseils personnalisés à suivre pour son propre entrainement.
La newsletter est là pour document une expérience de terrain et d’apporter une méthodologie / un éclairage sur l’entrainement.
Certains tests, certains entrainements peuvent être à risque pour des personnes débutantes.
Pensez à vous renseigner auprès d’un professionnel, à bien vous échauffer et ne pas tenter n’importe quoi.
L’objectif est de montrer que l’on peut améliorer ses performances en faisant des entrainements moins difficiles (entre autres) : gardez surtout cela en tête et ne partez pas forcer comme une brute, surtout si vous n’êtes pas coutumier du fait !
Mercier, D., Léger, L., Desjardins, M. Nomogramme pour prédire la performance, le
VO 2 max et l’endurance relative du coureur de fond. Médecine du sport 58(4): 181-187,
1984.